Evo Jovičić Laurent Fiorentino

Nontiscordardime

Du 07 au 30 mars 2025

Vernissage le vendredi 07 mars 2025 dès 18h00

Exposition visible les samedis de 13h à 17h
ou sur rdv.

La salle de bain est un lieu humide.

Chez ma grand-mère, elle était rose, toute rose. Les rideaux de douche étaient roses, les
savonnettes étaient roses, les serviettes de bain étaient roses, les tapis étaient roses, la faïence
était rose, les ampoules étaient rose. Pourtant, elle n’avait rien d’excentrique.

Un jour, à l’âge de quatre ou cinq ans, probablement, j’avais, pour la première fois, fermé la porte
à clé pour les utiliser. Il ne fallait pas me déranger. La suite de l’histoire est grande comme une
maison: au moment de sortir, j’étais coincée à l’intérieur. Ce qui devait être un moment marquant
de ma maturation sur le plan émotionnel et moteur s’est révélé être un véritable cauchemar.

Pendant les quatre ou cinq premiers mois de ma coloc, nous n’avions pas de clé dans la sdb
invité-e-x-s. Nous avons organisé une fête et j’ai rencontré plein de gens soit parce qu’iels ont
ouvert la porte alors que j’utilisais les toilettes soit parce que j’ai ouvert la porte alors que
quelqu'un l’utilisait. Social anxiety fears me.

En vertu des pouvoirs qui me sont confiés et afin de répondre à certaines attentes du milieu, il
serait d’usage que je vous parle de cette pièce, comme un véritable espace liminaire… Mais, non.

La tension qui existe dans une salle de bain où l’on se rend particulièrement vulnérable a été
largement exploitée dans le cinéma. De Psycho au Shining à Squidgames, mais aussi Euphoria ou
encore Christiane F: elle est le lieu de tous les vices et de tous les drames.

Forcé-e-x-s par les conjonctures économiques actuelles et aussi, par la force d'une pression
sociale parfois écrasante, il est d’usage que les couples habitent ensemble. Par un procédé
absurde et maléfique, chacun-e-x en perd éventuellement sa “chambre à soi”.

Alors, la salle de bain devient parfois un lieu privilégié de moment pour soi. Mais ça ne dure pas
longtemps. Lorsqu’on est très amoureux-ses, on s’y laissera des mots sur des post-its, comme:

Passe une bonne journée, mon amour.
Turn me on.
Je t’aime à l’infini!
Nontiscordardime…
Oublie pas le poisson, merci.
Golosamente aspetti.

Ici, les pièces d’Evo, sont plus proches des mots d’amour que des rideaux de douche, bien que
dans ce contexte, je comprends que cela puisse porter à confusion. Voyez-y plutôt des post-it
écrits par un géant, qui, raconte son amour taille XXL mais avec la précision d’un lilliputien.

En ce qui concerne les tuyaux de Laurent, il me semble évident qu’on ne puisse pas en parler
sans évoquer Fontaine de Marcel Duchamps. Pardon! En vertu des pouvoirs qui me sont confiés
et afin de répondre à certaines attentes du milieu, et malgré la riche liste de lecture que Laurent
m’a fourni je ne peux m’empêcher de le dire!! Selon mon connoisseurship, il s’agirait bien de la
“backroom” de Fontaine…

Bref, qu’on pisse assis-e-x ou debout, ce qui fait marrer Laurent, c’est que tout aille toujours finir
au même endroit, à savoir chez Leonardo, Raphael, Donatello, Michelangelo .
avant d’être recueillis par Splinter.

Katia Leonelli